Durant
l'entre-deux-guerres, résistant, déporté, diplomate, amateur de poésie, icône
internationale d'une génération qui a reçu le manifeste Indignez-vous ! comme
un appel et un espoir?
Un seul nom pour
toutes ces vies : Stéphane Hessel.
Voici le premier
essai biographique jamais écrit sur cet homme d'exception. Manfred Flügge, qui
le connaît depuis près de trente ans, nous livre à la fois un portrait intime,
un récit des années de combat et une analyse passionnante du phénomène médiatique
et des polémiques que son opuscule a pu susciter. « Un livre dont j'admire la
pertinence, l'authenticité et qui correspond à ce que je ressens. » Stéphane
Hessel.
Mon avis :
Ce livre est un
essai biographique sur Stéphane Hessel , dont la vie foisonnante dans laquelle
la poésie joue un grand rôle fascine les personnes qui le découvre.
Voilà un homme, qui,
après une jeunesse et une vie professionnelle extrêmement riche et variée devient célèbre à plus de quatre vingt dix
ans, avec un petit recueil "indignez vous" qui devient un phénomène
d'édition.
Le livre est en
plusieurs parties, on découvre les origines familiales de Stéphane Hessel dans
un milieu culturellement riche, on y rencontre nombre des
artistes qui ont fait le début du 20ème siècle, puis la vie
de ses parents, dont le long épisode avec leur ami Henri-Pierre Roché a inspiré
a ce dernier le roman dont a été tiré le célèbre film "Jules et Jim" . On découvre
ensuite la jeunesse de Stéphane Hessel, puis les années de guerre, la
résistance et les camps de concentration, pour arriver après guerre à sa
carrière diplomatique .
Le livre se poursuit
avec les circonstances de l'écriture du livre par Manfred Flügge qui décrit ses
rencontres avec Hessel et raconte toute la passion de ce dernier pour la poésie
tout au long de sa vie.
Enfin, il se termine
par une histoire documentée et sans concession du manifeste "indignez
vous" ainsi que de "engagez
vous" qui en a suivi la publication et d'une analyse des critiques et des
polémiques suscité par ces livres et les
positions prises durant cette période
par Stéphane Hessel.
L'écriture de
Manfred Flügge est claire et les analyses systématiques, on est devant un
travail de précision, une grande amitié
transparait mais il n'y a pas de concessions et l'auteur sait être
critique et montrer les points sombres, les faiblesses ou les erreurs sans
jamais oublier les qualités et il cherche
toujours à comprendre ce qui peut avoir amené telle ou telle situation.
Toutes les analyses
sont soigneusement documentées, c'est un remarquable travail de biographie
sensible.
Parfois, le ton
devient très didactique et les démonstrations peuvent paraitre un peu longues,
mais cela ne nuit pas à la clarté du propos.
Un livre
vraiment complet, qui permet de mieux
comprendre qui est Stéphane Hessel en
allant bien au delà des polémiques et de se faire sa propre opinion en
connaissance de cause.
Quelques extraits :
Franz Hessel n'avait
pas l'ambition d'être un grand auteur, de créer une grande œuvre. Il ne voulait
rien construire mais seulement jouir de ce qui existait déjà et en témoigner.
Il ne s'agissait pas pour lui de conquérir, mais de donner à voir. "Nous
ne voyons que ce qui nous regarde", écrivit il.
A la maison, il
avait dessiné dans un cahier tout un atlas fantastique. Mais il n'y avait qu'un
seule région dans ce monde, l'archipel Hesselland. Famille et amis, chacun
avait son ile. Peut être devrait-on reconstituer la vie de Stéphane Hessel de
cette manière, comme un atlas retraçant les histoires des iles, autant de de
monades du destin gagnées ou perdues.
Le roman, le
scénario de l'imaginaire, est un jeu avec nos aspirations (même les plus
inavouables), une tentative pour échapper à la temporalité, en en suggérant une
autre, celle du récit. L'autre est ce qui nous manque (et donc nous attire), il
peut même s'agir du monde entier.
Le poème contient
dans le même temps l'affirmation de la vie et le consentement à la mort. La vie
se manifeste à travers la prosodie, la sonorité, le plaisir de dire les vers en
respectant leur rythme. Le caractère définitif des choses se manifeste dans l'énoncé
comme dans la forme. "La beauté est la vérité, la vérité est la
beauté" : ces paroles de Keats contiennent tout ce qu'on doit savoir sur
terre.
La poésie est
d'abord plaisir - plaisir des mots, des sons, du parler, de la forme -, et elle
devient seulement ensuite un jeu, une affirmation têtue de la volonté de vivre
quand on se trouve dans une situation critique. Et elle est aussi magicienne,
car elle rappelle l'existence d'autres sphères, renvoie à un au-delà de
l'instant présent dans lequel elle se manifeste. La poésie se loge tout à la
fois entre les temps et au seuil de l'éternité. Elle rend présent, vivant,
actuel tout ce qu'elle implique au moment même où on la récite.
Un livre qu'on devrait peut-être ajouter en complètement à la lecture du (trop ?) célèbre "Indignez-vous" ?
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