mercredi 30 mai 2012

Middlemarch, George Eliot

Présentation de l'éditeur :

Middlemarch (1871-1872) est sans doute le plus beau roman de George Eliot, en tout cas son roman le plus complet (le sixième sur sept). Deux intrigues sentimentales principales, l'histoire des deux mariages de Dorothea et le mariage malheureux de Lydgate, jeune médecin ambitieux, avec la vulgaire Rosamond Vincy, se détachent sur un fond foisonnant de personnages et d'événements, d'épisodes intéressants, amusants, émouvants. Un des charmes de George Eliot est dans cette surabondance de détails. Nous avons fait figurer en préface un beau texte de Virginia Woolf sur George Eliot : " L'issue fut triomphale pour elle, quel qu'ait pu être le destin de ses créatures ; et quand nous nous rappelons tout ce qu'elle a osé, tout ce qu'elle a accompli, la façon dont, malgré tous les obstacles qui jouaient contre elle (le sexe, la santé, les conventions), elle a cherché toujours plus de savoir, toujours plus de liberté jusqu'au jour où le corps, accablé par son double fardeau, s'effondra, épuisé, nous devons poser sur sa tombe toutes les brassées de lauriers et de roses que nous possédons. " 

Mon avis :
 L'intrigue de Middlemarch tourne autour de différents mariages.Celui de Dorothéa avec M. Casaubon puis le  long suspense de son second mariage, celui de Lydgate, le médecin ambitieux avec Rosamond Vincy et celui de Mary Garth  avec Fred Vincy, sans oublier les mariages déjà installés qui interviennent dans l'histoire.
Nous sommes donc avant, pendant, après différents mariages, tous ayant des liens entre eux. George Eliot nous brosse sur cette trame un magnifique portrait de la campagne anglaise, une chronique très large d'une communauté dans tous ses travers.
Ecrit au 19ème siècle sur des personnages et des évènements de ce même siècle, ce roman n'a pas pris une ride, la langue utilisée est très moderne et malgré sa longueur, se lit très facilement. La traduction de Sylvère Monod est remarquable.
Je conseille de lire la préface qu'a écrite Virgina Woolf seulement après avoir fini le roman, surtout si c'est le premier de George Eliot que vous lisez.

 Quelques extraits :
Mon père ne changeait jamais d'avis, et il faisait de simples sermons moraux sans arguments, et c'était un homme droit - le plus droit du monde. Quand vous me trouverez un homme droit fait d'arguments, je vous confectionnerai un bon dîner rien qu'en vous lisant le livre de cuisine. Telle est mon opinion, et je crois que tous les estomacs la confirmeront
 
Certes, de telles comparaisons risquent d'être trompeuses, car nul homme n'était plus incapable de brillante affectation que M. Casaubon ; il avait un caractère aussi authentique que n'importe quel ruminant, et il n'avait pas contribué à faire naître des illusions sur son propre compte. Comment se faisait-il qu'au cours des semaines écoulées depuis son mariage Dorothea eût, non pas discerné clairement, mais senti avec un abattement étouffant, que les vastes perspectives et l'abondance d'air frais qu'elle avait rêvé de trouver dans l'esprit de son mari eussent été remplacées par des antichambres et des couloirs tortueux qui ne menaient nulle part ? Je suppose que c'est parce que pendant les fiançailles tout est considéré comme provisoire et préliminaire, et que le plus modeste échantillon de vertu ou de talent est censé garantir l'existence de précieuses réserves que feront découvrir les amples loisirs du mariage. Mais une fois franchi le seuil du mariage, l'attente se concentre sur le présent. Quand on est embarqué pour le voyage conjugal, il est difficile de ne pas se rendre compte qu'on avance pas et que la mer n'est pas en vue - bref, qu'on est en train d'explorer un bassin fermé.

Chez Will existait bien l'intention de toujours se montrer généreux, mais notre langue agit comme une petite gâchette qui se trouve généralement libérée avant que ne puissent intervenir nos intentions permanentes.

Ces boissons renferment la vérité dans la mesure où elles ne mentaient pas au point de faire apparaître gai le pauvre Dagley ; elles rendaient  son mécontentement moins taciturne que d'habitude. Il avait aussi absorbé une trop forte dose de conversation politique vaseuse, tonique dangereusement perturbant pour son conservatisme rustique, qui consistait à estimer que tout ce qui existe est mauvais et que tout changement risque de faire empirer les choses.

- Fort bien monsieur le docteur Triste-Figure, dit Rosy, dont les fossettes se creusèrent. Je proclamerai désormais que je raffole des squelettes, des voleurs de cadavres, des fragments de corps dans des flacons, et des disputes avec tout le monde, qui aboutissent à vous faire mourir misérablement. 
- Non, non, ce n'est pas si terrible que ça, dit Lydgate, qui renonça à protester et se mit à câliner sa femme avec résignation.


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